Concernant le patient et sa famille

Le moment est opportun de poser ici la question du sens même de la démarche du patient ou de ses proches, qui ne se limite pas à la quête d’un diagnostic et d’un traitement :

Quelles sont leurs attentes ?

Les nombreux ouvrages sur la relation aux patients résument leurs attentes en quatre points :

  • être informé
  • être écouté
  • être reconnu
  • être accompagné.

Si « être informé » semble logique, compte tenu du devoir d’annonce et pour autant qu’il n’y ait pas de rétention d’information, « Etre écouté » reste une attente du patient et de ses parents trop fréquemment oubliée. Or l’écoute est tout aussi importante que l’information qui est transmise. Elle induit une reconnaissance, d’une part de leurs souffrances et d’autre part, de leur compétence, de leur capacité à faire face à la réalité.

La littérature abonde à propos de la relation “triadique” qu’il est souhaitable d’instaurer entre les partenaires : le professionnel, les parents et le patient/l’enfant. On parle souvent aussi d’alliance thérapeutique.

Quelle que soit la terminologie, cette alliance induit un accompagnement, une reconnaissance du rôle de chacun dans l’information et dans l’écoute.

Dr Alain de Broca :
L’écoutant principal (le soigné) ne demande pas seulement à être informé (…), mais aussi à être écouté. Le praticien ne devrait-il pas plus souvent songer au sculpteur qui écoute comment résonne le bloc de pierre avant de lui asséner les premiers coups de burin ? (66)


Florence M. (Maman) :
C’est des rapports médecins – infirmières : toujours pressés. Les aides-soignantes ? Pareil. Les puéricultrices ? Très peu. Dans la mesure où Guillaume était très peu actif, il n’y avait pas trop d’intérêt à s’occuper de lui. (67)


M. Dartois (papa) :
Depuis le début de sa scolarité à 3 ans, je me rends bien compte que ma fille est « différente » des autres enfants. Les maitres d’école, les médecins (…) n’ont jamais pris en considération mes remarques et mon appel au secours. Lisa est actuellement en 6ème et a d’énormes difficultés scolaires. Enfin un médecin scolaire s’est intéressé à elle et a diagnostiqué avec la psychologue une dyspraxie. Je suis très en colère car nous avons perdu beaucoup de temps de rééducation et Lisa a beaucoup souffert des réflexions. (68)


Mme Juliette PRIGENT, orthophoniste :
Pour les soins de son enfant, le parent doit rester le parent, mais il est avant tout l’élément moteur et fédérateur de son évolution. Il décide avec qui, à quel rythme, et dans quel cadre l’enfant doit être suivi. Il est aussi primordial que les spécialistes fassent confiance à la famille, dialoguent, encouragent et valorisent. Ils se doivent de ne pas cloisonner les informations, ni de juger la famille, et encore moins la mère, ce qui est extrêmement déstabilisant pour elle, déjà peinée par cette situation douloureuse. C’est ainsi que l’on peut leur témoigner notre confiance et les renforcer dans leur statut de parent. (69)

Quel message clé leur donner ?

Eu égard à leurs attentes et en dehors des informations médicales, y a t-il un message à faire passer au patient et à ses proches ?

La littérature dans le domaine préconise souvent la phrase : “Vous n’êtes pas seuls”. Dans la mesure où chaque être humain reste résolument seul face à sa propre réalité et ses souffrances, on peut se poser la question de son adéquation.
“Nous sommes là et resterons présents pour vous aider” ne serait-il pas plus en phase avec la réalité et notre rôle ?

Mais au-delà des mots, le message issu d’une rencontre véritable entre vous, le patient et sa famille sera probablement le plus juste.

Mme Jacqueline CAVELIER, psychologue :
Il s’agit d’instaurer une alliance thérapeutique, basée sur un véritable contrat de confiance : « Non, je ne suis pas tout-puissant, je ne peux pas tout pour vous (sous-entendu, je ne peux pas vous promettre la guérison définitive) mais je ferai le maximum, et je ne vous abandonnerai pas ». (70)


Jean-Éric (papa) :
« Il va falloir l’aider. Vous êtes les seuls à pouvoir le faire ». Cette déclaration d’un médecin nous a fait reprendre le dessus. Et puis, surtout, nous avons cicatrisé quand nous nous sommes dit que le polyhandicap était la faute à « pas de chance » et qu’il fallait arrêter de chercher des causes. (71)

Quel est l’environnement du patient et de sa famille ?

Si cette question a déjà été posée lors de la préparation de l’annonce, il est plus que probable qu’elle n’ait pas obtenu toutes les réponses. Des difficultés affectives, sociales ou professionnelles peuvent préexister ou apparaître avec la déficience.
Les connaître permettra de prendre conscience d’une situation potentielle de surhandicap

Dr Alain de Broca :
Accompagner, c’est recommencer toujours et toujours les entretiens avec chaque membre de la famille, pour mieux apprécier son environnement et recevoir en confidence l’histoire de la famille parfois si douloureuse qu’elle en est souvent refoulée. Cette histoire familiale et personnelle est alors si lourde à porter qu’elle influence, inconsciemment et fortement, leur regard et leur décision pour l’enfant malade. (72)

Quelles seront les conséquences de cette déficience dans la vie de la personne et de sa famille ?

Si de nombreuses conséquences potentielles ont été évoquées en préparant l’annonce, s’enquérir des difficultés concrètes qu’entrevoit le patient ou sa famille, permettra de mettre des mots sur leurs inquiétudes et leurs priorités, et vous permettra de les guider, au besoin, vers des services sociaux, d’aide précoce et d’accompagnement, ou vers des associations.

Se renseigner si nécessaire sur l’aide de proches dont ils disposeraient permettra de cerner au mieux leur situation.