Est-il possible de surmonter cette épreuve ?

Le plus souvent, dans les premiers temps, l’annonce met KO, on ne voit pas le bout du tunnel.

La nature ou l’évolution de votre déficience, la manière dont elle vous a été annoncée, la qualité de votre prise en charge et les réactions de vos proches vont bien sûr avoir une influence sur l’intensité du choc.

Mais pas nécessairement sur vos réactions ni sur le temps qu’il vous faudra pour réaliser ce qui vous arrive.

Dans un premier temps, la colère ou la révolte peuvent vous donner de l’énergie. Le réconfort massif apporté par votre entourage peut vous soutenir. Les rêves et les illusions peuvent vous préserver pendant un moment. L’isolement ou la fuite des émotions peuvent vous protéger temporairement. Mais ce qui vous a soutenu initialement peut à la longue vous enfermer.

Rester accroché trop longtemps à un équilibre qui protège de la réalité finit par demander beaucoup d’énergie et en laisser très peu pour se reconstruire.

Le temps nécessaire pour entamer un chemin de reconstruction est très personnel. Se comparer à d’autres peut être décourageant ou culpabilisant. Se laisser inspirer par d’autres peut donner de l’élan. Mais se connaître soi-même, faire confiance en ses propres capacités et les utiliser pleinement est certainement le meilleur moyen d’avancer.

Vous avez survécu. L’étape suivante, c’est vivre.

93
Eva, atteinte d’une déficience motrice
« Il m’est arrivé, à l’âge de quatorze ou quinze ans, de maudire mon sort, de crever d’envie à la vue de mes copines. (…) Mais la colère me bouffait tellement que j’ai vite arrêté. Cette sale expérience a été positive. J’ai cessé définitivement de me prendre la tête. (…)
Je suis IMC, c’est un fait indépassable. Savoir pourquoi n’a aucun intérêt. L’essentiel est de savoir ce que je vais en faire ».

11
Christine, atteint d’une déficience visuelle
« Les gens imaginent souvent que parce que je suis aveugle de naissance, la vie est plus facile car l’acceptation ‘va de soi’. Mais et pourquoi donc les choses iraient-elles de soi ? Pourquoi serait-il aisé de naître privé de quelque chose ? Pourquoi serait-il normal de l’accepter sans mot dire ? N’est-ce pas révoltant, au contraire ? Pourquoi vivre dans ces conditions ? Pour espérer en la science qui, un jour, ‘pourrait nous sauver’ ? Pour se raccrocher à la religion (peu importe laquelle) comme à une bouée, afin de ne pas sombrer dans la dépression ? »

83
Serge, atteint d’une déficience motrice
« Une étape importante dans mon évolution personnelle a consisté à reconnaître mon handicap et à être capable d’en parler publiquement. Il ne s’agit évidemment pas de s’apitoyer sur son propre sort dans une attitude de laisser aller qui consisterait à dire ‘je ne suis pas responsable de mon existence parce que je suis handicapé’. Il ne s’agit pas de laisser le handicap régir notre vie, mais au contraire de reconnaître les limites que nous impose le handicap de manière à pouvoir tirer le meilleur parti de notre existence en toute connaissance de cause. En quelque sorte, il s’agit d’apprivoiser notre handicap. »

106 D
Témoin anonyme
« Aujourd’hui les difficultés que je vis suite à mon handicap, je les dépasse et je ne les vis pas comme un poids mais comme des caractéristiques, au même titre que l’on peut avoir les yeux bleus ou les cheveux blonds. Pour parvenir à cette nouvelle considération de mon handicap, à ma renaissance, à cette image de soi qui est la vraie, l’unique, j’ai dû beaucoup travailler sur moi-même, sourire, pleurer, chercher, refuser, accepter, payer, essayer, donner comme je continue à le faire aujourd’hui… »

62
Personne atteinte d’une déficience motrice
« Le fauteuil roulant dérange et fait mal aux autres, à moi. Il est le signe visible et insupportable d’une maladie qui ne se voit pas.
Mon évolution fait peur, fait mal.
Mon entourage a parfois du mal à accepter. Je sais que je ne peux pas leur demander plus qu’ils ne peuvent porter, et qu’il me faut respecter leurs réactions, même si elles ne sont pas toujours celles que j’aurais souhaitées.
Mais moi, ai-je la liberté d’accepter ou de refuser la maladie, son évolution, son pronostic ? Et moi, puis-je dire que je ne supporte plus ?
« Dis, toi, l’autre qui m’habite, on arrête un peu la cohabitation, on fait chambre à part, seulement quelques jours, d’accord ! »