Parler de soi

Comme il fait partie de votre vie, vous faites sans doute souvent allusion à votre handicap. En parler peut vous aider à y voir plus clair en vous-même, pour vous décharger d’émotions difficiles, pour trouver des réponses à certaines questions ou encore pour partager votre expérience. Et vous n’en parlez probablement pas de la même manière à tout le monde, que ce soit à des amis ou à des professionnels.

Les amis sont importants, surtout lorsqu’ils sont capables d’être simplement à l’écoute. Il n’est pas toujours évident de se confier, de se permettre par exemple d’exprimer ses peines et ses frustrations sans crainte de lasser, de blesser, d’attrister, d’inquiéter, d’être jugé, etc. On peut parfois aussi provoquer des réactions déplaisantes : des conseils moralisateurs ou inadéquats, des encouragements maladroits, des questions indiscrètes, … Ce type d’échanges peut rapprocher ou au contraire amener à faire le tri parmi ses relations.

Certains professionnels de la santé sont peut-être devenus pour vous des confidents ou du moins des témoins importants de vos états d’âme, de votre évolution. Ou vous ressentez peut-être le besoin de dépasser le stade des confidences et d’effectuer un véritable travail sur vous-même, avec l’aide d’un psychologue ou d’un psychothérapeute. Cela peut vous aider à trouver quelles sont vos forces et vos motivations profondes. Les professionnels formés à l’écoute offrent un espace dans lequel toutes les émotions peuvent être déposées et accueillies sans jugement, avec bienveillance. Selon l’aide que vous recherchez, vous pourrez vous diriger vers différents types de professionnels, vers différents lieux d’écoute.

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Témoin anonyme
« J’ai eu souvent ce sentiment que l’évocation de ce que je vivais était reçue comme une plainte. Et c’est une réelle souffrance pour moi : une valeur ajoutée à la parole, qui, progressivement m’interroge sur la limite de pouvoir prendre le risque de partager, en vérité, des événements difficiles et récurrents. Le souci de pouvoir ne pas être trop lourde pour les autres est devenu constant. L’exigence de ne pas « en rajouter » est devenue fondamentale.
J’ai découvert qu’oser dire la souffrance peut mettre l’autre en pseudo-situation d’échec, parce qu’il ne peut rien faire contre la situation présente (…)
Lorsque j’appelle parce que je suis mal, j’attends simplement que l’autre puisse être tout bonnement là, oreille écoutante, bienveillante. »

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Eva, atteinte d’une déficience motrice
« Les enfants de mes sœurs ont joué pendant des mois avec mes cannes avant de me demander pourquoi j’étais comme ça. Au début, je n’osais pas la vérité. Je préférais raconter que j’avais mal aux jambes. Puis je les ai vus s’impatienter devant le retard de ma guérison alors que leurs propres bobos avaient le bon goût de disparaître rapidement. J’ai compris qu’il ne fallait pas mentir. Je leur ai expliqué, comme j’ai pu, les mystères de ma naissance. Ils ont hoché la tête d’un air entendu. Ils continuent à subtiliser mes béquilles mais ils m’expliquent qu’ils seront médecins plus tard pour que je puisse enfin jouer avec eux. »

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Sarah, atteinte d’une déficience motrice
« J’ai baptisé mon kiné ‘M. Kinési’ et pas seulement ‘mon kiné’ tout court. ‘Monsieur’ est une marque d’honneur et d’admiration. Une puissance protectrice se dégage de ses gestes précis, de ses mains si grandes qu’elles recouvrent tout mon dos. Il est capable de me soulever pour les bretelles de ma salopette avec une seule main : impressionnant ! S’il mérite que je l’appelle ’monsieur’ c’est parce qu’il s’occupe non seulement de mon corps mais aussi de mon esprit. Il a été et sera toujours mon plus grand confident »